Découvreuse de mondes

Je suis peut-être une exception – ou pas –, mais ce n’est pas un livre qui m’a donné l’envie d’écrire.
Quand j’étais enfant, mon père, qui écumait le monde pour son travail, me rapportait des trucs bizarres: caïman empaillé, peau de boa constricteur, mocassins amérindiens, bijoux en turquoise, rose des sables ou têtes réduites d’Amazonie. Non contente d’exhiber cette moisson fabuleuse en classe pour épater mes petits camarades, je m’empressais d’imaginer des histoires, toutes plus fantastiques les unes que les autres, pour expliquer l’origine, pas toujours très orthodoxe, de ces objets. Pris au jeu, mon père m’a vite rejointe et a commencé à jeter sur papier des scénarios mettant en scène ces trouvailles venues du fin fond de la planète. Scénarios que j’illustrais en bande dessinée, ma première passion (ma mère était dessinatrice), après mes fastidieuses journées d’école.
Nos fictions foisonnaient de péripéties extraordinaires où des savants géniaux, mais toujours fous jouaient des rôles prépondérants en faisant des découvertes majeures ou en organisant des expéditions aux confins du monde connu. Ça ressemblait aux aventures de Tintin, mais en plus rocambolesque. Il faut dire que, jusqu’à mes cinq ans, nous habitions Bruxelles, le temple de la BD.
Ainsi nourrie par les voyages de mon père et des récits qui s’en inspiraient, je voulais à mon tour explorer les pays lointains, partir sur la trace de civilisations anciennes, de cultures différentes et, pourquoi pas, découvrir l’Atlantide! C’est sans doute ce qui a motivé mon intérêt précoce pour l’archéologie et l’anthropologie.
C’est un peu plus tard, en dévorant les romans d’Henri Vernes, «Les aventures de Bob Morane», qui circulaient entre les bancs d’école, que j’ai pris conscience que les histoires que nous concoctions, mon père et moi, appartenaient au genre de la science-fiction.
À l’époque, je mettais en pratique mes récits avec un groupe de copains, constitué essentiellement de garçons un peu frondeurs. Ensemble, nous écumions le quartier de Champel, à Genève, qui, avec ses maisons abandonnées, ses falaises, ses bois touffus et sa Tour, se prêtait bien au jeu.
Ensuite, vers dix ou onze ans, j’ai découvert Nathalie Henneberg et son magistral space-opera : « La Plaie ». Une lecture un peu coriace pour cet âge tendre, mais son écriture originale et son sens du merveilleux ont achevé d’enflammer mon imagination. Dès cet instant, ma voie était tracée : j’écrirai un jour à mon tour des romans de science-fiction !
Forte de cette révélation, j’ai dévoré tous les classiques anglo-saxons du genre, dont une bonne partie peuplait la bibliothèque de mon père : Asimov, Clarke, Simak, Vance, Anderson, Dick, Priest, Silverberg, Hamilton, Bradbury...
Pour en revenir au présent, ou au futur proche, dirons-nous : quelle serait la première phrase de mon prochain roman ? L’Univers n’est pas ce que nous croyons... Non, je rigole... à peine ! Je n’en ai aucune idée. Je viens juste de publier «Origines», le dernier tome de ma trilogie «QuanTika», aux éditions l’Atalante. Alors, je savoure encore cette récente parution.
Avec «QuanTika», qui raconte la découverte d’une exoplanète, comprenez une planète située hors de notre système solaire, et d’une ancienne civilisation stellaire ayant jadis visité notre Galaxie, j’ai pu explorer à loisir mon sens du merveilleux et traiter les sujets que me tiennent à coeur depuis l’adolescence, à savoir le rapport de l’humain face à la science et aux mythes cosmogoniques. En clair, parler de l’Univers qui nous entoure et de ses multiples représentations. «QuanTika» est une translation, passant des vérités scientifiques aux solutions apportées par le mythe. C’est un mouvement de va-et-vient, fait d’interrogations, de doutes et de surprises, qui conduit le lecteur de «Vestiges» à «Origines», le dernier tome de la trilogie.
C’est cet ultime volet que je me propose de vous présenter au Livre sur Les Quais cette année. Bien sûr, vous pourrez également découvrir «Vestiges», paru en 2012, et «L’Ouvreur des Chemins», paru fin 2013. Je me ferai un plaisir de vous parler de Gemma, planète extrasolaire glacée orbitant autour de son étoile double AltaMira, des mystères de la physique quantique et des nombreux personnages qui peuplent l’univers de «QuanTika».

Laurence Suhner