La piscine

Chaque semaine, un auteur nous raconte son Livre sur les quais.

J’avais tout prévu. Les stylos pour les dédicaces, les baskets pour courir autour du lac Léman le matin et le maillot de bain. Recherche sur Internet pour trouver l’adresse de la piscine municipale, le soleil semblait de la partie, c’était l’occasion.

Quelle chance, la piscine se trouvait juste à côté du salon. À pied, on mettait cinq minutes. Le jogging le matin avait été bienfaisant, je me réjouissais de la séance natation. Parce que les salons, c’est du partage, des lecteurs, des rencontres, mais sans aucune lassitude c’est quand même souvent similaire. Moi la Française, je venais faire un salon en Suisse, c’était assez nouveau, et assez excitant. Surtout que Le livre sur les quais on m’en avait parlé, c’était classe.

Alors j’avais envie de savourer jusqu’au bout et le soir il était prévu le cocktail au bord de l’eau avec les vagues qui viennent s’échouer contre les rochers et le bon vin qui ravive la bonne humeur, alors je misais sur un package "bien-être" total.

Traversée d’un parc, des enfants en roller, des mamans qui papotaient en surveillant du coin de l’œil, mon sac de piscine qui me chatouillait l’épaule.

La piscine.

Comme chaque fois que j’entreprends un acte nouveau, j’ai une appréhension, mais là, l’envie était mordante au creux du ventre et j’ai avancé. Un type m’a accostée et m’a proposé des billets d’entrée moins chers, voire même gratuits. J’ai dit oui, j’en ai achetés. Moins chers.

Pas de casiers pour ranger son sac pendant qu’on nage et comme une idiote, je n’avais pas osé laisser mon ordi portable sur le salon, il était dans mon sac.

Pas vraiment bien joué.

Tant pis, j’y étais, j’allais jusqu’au bout.

J’ai repéré une jeune femme seule avec sa petite fille, je lui ai proposé de l’argent pour garder mon sac, elle ne pouvait pas, surveillait sa fille. J’ai repéré le maître nageur, debout sur un banc qui surveillait les deux bassins, une fois un coup d’œil devant, une fois un coup d’œil derrière.

J’ai glissé mon sac sous le banc juste en dessous de ce vigile et j’ai vu alors. Le bassin.

Majestueux.

Olympique.

Des longueurs incroyables.

Sous un soleil joyeux.

Alors je suis entrée dans le bassin. Et j’ai nagé.

J’avais tout prévu. Les stylos pour les dédicaces, les sourires, les lecteurs, les rencontres, voir Eric-Emmanuel Schmitt, retrouver des auteurs amis, courir autour du lac Léman, mais ça, je n’avais pas prévu. Ce bonheur de nager dans un bassin divin aux dimensions incroyables au milieu d’inconnus.

Il est des salons qu’on n’oublie pas. Allez savoir pourquoi...

Calouan